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Grand Ensemble Vocal d'Annecy

Activité du Grand Ensemble Vocal d'Annecy

Bach plagiaire de Vivaldi ?

Publié le 1 Avril 2014 par François Darot in Bach, Vivaldi, Assistance Technique

C'est lors de son second séjour à Weimar (1708-1717)que Bach découvre vraiment la musique italienne, grâce à l'organiste virtuose de cette ville, 

Johann Gottfried WaltherJohann Gottfried Walther, grand amateur du style italien. 

Johann Gottfried communique à Johann Sebastian de nombreuses copies de partitions de Frescobaldi, Legrenzi, Corelli, Albinoni... et bien sûr et surtout de Vivaldi ! JSB est particulièrement impressionné par ce dernier, notamment par ses concertos pour violon. A tel point qu'il entreprend immédiatement de s'en faire des « copies » personnelles...

 

Malheureusement (ou heureusement !) la photocopieuse se fait attendre, et surtout quand on s'appelle Bach, on ne peut pas se contenter de jouer les vulgaires copistes (comme devra le faire un peu plus tard Jean-Jacques pour assurer son casse-croûte)... 

Manuscrit de JS BachDonc Jean-Sébastien, plutôt que de risquer des fautes de frappe, en rajoute de sa plume : il transcrit, transpose, arrange, met de l'orgue ou du clavecin à la place des violons ou l'inverse, bref il bricole à sa sauce ! Au final, cela donnera des œuvres de Bach «d'après» Vivaldi, œuvres qui figureront par la suite à son catalogue, le fameux « BWV » (pour les érudits sous les numéros 593, 594, 596, 972, 973, 975, 976, 978, 979, 980, sous bénéfice d'inventaire car on n'a pas forcément retrouvé toutes les œuvres de Vivaldi qui auraient pu faire l'objet d'une telle adaptation...).

 

Ces « oeuvres » ont donné lieu à des appréciations diverses, en particulier selon que le critique est un « fan » de Jean-Sébastien ou d'Antonio...

Ainsi Luc-André Marcel (Bach, Seuil 1961) :

« Du reste Bach traite librement ses modèles. Il les transcrit mais n'hésite pas à les enrichir à sa manière. Il les revit. Ces additions prennent, de ce fait, un caractère de nécessité remarquable. Elles eussent laissé Vivaldi rêveur. Çà et là un renforcement harmonique, quelques touches rythmiques et contrapuntiques, le cerne d'un détail, l’embellissement d'une phrase, et déjà, nous entendons moins du Vivaldi que du Bach ».

Mais Roland de Candé (Vivaldi, Seuil, 1967) lui répond :

« Pour habile que soit le magnifique travail de Bach, ces transcriptions n’ajoutent rien à sa gloire. J'avouerai même, au risque de blasphémer, que les concertos vivaldiens, d'essence violonistique, me paraissent tout à fait dénaturés par l'exécution au clavecin ou à l'orgue. Indifférent à la sensualité instrumentale de ses modèles, à la souplesse des lignes, à la transparence des sonorités, Bach a génialement trahi Vivaldi : d'une œuvre polychrome, il a donné une brillante interprétation en noir et blanc ».

 

D'autres vont beaucoup plus loin dans l'accusation de « plagiat »... ainsi Claude Fernandez dans un long article au titre iconoclaste « Bach est-il un grand compositeur ? »  (qu'on peut lire en ligne :  ici ) instruit en règle le procès à charge.

Et la polémique déborde même sur YouTube (mais qu'est-ce qui ne déborde pas sur YT ?) avec « preuves » musicales à l'appui :  ici

 

Heureusement qu'au GEVA nous travaillons (du moins nous essayons modestement...) à réconcilier le prêtre roux de Leipzig et le cantor de Venise, Antonio Bach et Jean-Sébastien Vivaldi !

 

 
 
 
Vue de Weimar
 
Johann Gottfried Walther

Johann Gottfried Walther

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R
JSB n'a pas plagié Vivaldi a mon sens, il en était un grand fan j'imagine. Car retranscrire ces concertos est la preuve d'un homme charmé par la musique, la virtuosité de cet artiste. Sans compter que Vivaldi était pretre, cela devait selon moi être pour JSB un élément important de son désir de le faire connaître au plus grand nombre....Comment un homme d'église peut écrire de tels chefs d'oeuvres...JSB peut être le premier GRAND fan de Vivaldi. C'est plutot comme cela qu'on doit comprendre le travail de Bach....ce n'est pas un plagiat, mais une preuve de son admiration pour le "pretre roux".
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P
Pas de doute sur le fait qu'ils se soient reconnus entre grands musiciens (enfin, que Bach ait reconnu Vivaldi).<br /> Quant à la question du plagiat, au fond, elle ne se pose pas, la notion même n'existant pas vraiment, au moins au sens où nous l'entendons aujourd'hui de &quot;propriété artistique&quot;. <br /> La frontière est très ténue à l'époque entre la citation déférente, voire l'hommage, l'honneur que l'on faisait à un artiste de copier son oeuvre, et la notion moderne de spoliation, de vol.<br /> Indiscutablement, Bach n'est pas un voleur, mais un grand connaisseur de la musique de son temps.
F
Excellente idée cette publication ! Merci ! Et forcément cela donne envie d'entendre...
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J
Que de choses très intéressantes. Je découvre plein de trucs, soit que j'ignorais, soit que j'avais oubliés. En tout cas j'ai passé un vrai bon moment à lire, à cliquer, à sourire, à fouiller etc...<br /> Bravo François et merci de nous tenir la main dans la multitude des infos.
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B
Merci François de ces informations érudites !
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